La mesure des obstacles - Stéphane Szerman
La mesure des obstacles © Stéphane Szerman
Changer ?
C'est simple et compliqué à la fois !
Qui n'a pas formulé ses bonnes résolutions au soir
du 31 décembre pour l'année suivante ?
Qui n'a jamais conçu un programme sur mesure pour parvenir à ses fins ?
Toutes ces situations révèlent souvent plus un idéal qu'une réalité
à partir de laquelle se construit le scénario du succès.
Malheureusement, après l'exaltation surviennent la peine,
la déception, puis le manque de confiance en soi.
Pourquoi ?
Parce qu'on n'est pas à la hauteur ?
Non !
Cela est tout simplement dû au fait
qu'on n'a pas mesuré les obstacles.
Dès l'instant où l'on choisit de s'engager
sur la voie du changement personnel,
il importe de bien connaître, et surtout de reconnaître
les divers obstacles relatifs à toute évolution.
Il existe, d'une part, des obstacles "intérieurs",
qui dépendent de nous-même, de notre personnalité.
Le désir de changer peut cacher une conduite
de mise en échec permanente.
D'autre part, on observe des obstacles "extérieurs",
qui tiennent aux réactions de notre entourage :
notre désir de changer provoque une menace sur celui-ci,
puisque nous sortons du rôle qu'il s'était habitué à nous voir jouer.
Ce sont ces obstacles, intérieurs ou extérieurs,
qu'il va falloir identifier et surmonter, une étape après l'autre,
pour que le désir de changement trouve sa réalisation.
Les obstacles intérieurs
Les obstacles intérieurs dépendent de nous,
aussi bien au niveau de nos pensées (cognitions) que de nos comportements.
Et le premier à vaincre est l'anxiété*.
Une cohorte de pensées négatives du type "je n'y arriverai jamais"
ou bien "on me juge mal" viendront faire obstacle
à toute tentative de changement.
Il faut savoir que le fait de vouloir, sans cesse,
se jeter des défis masque parfois, en réalité,
un phénomène d'angoisse structurelle.
On espère changer alors définitivement pour être un ou une autre.
Mais le problème reste entier puisqu'il faut être
déjà devenu un ou une autre pour changer…
Que d'angoisses !
Il s'impose donc de savoir se distancier mentalement
de soi-même de façon projective, sinon rien ne pourra introduire
cette prise de distance indispensable à toute évolution.
Le deuxième obstacle intérieur se situe
au niveau d'apprentissages que l'on juge incomplets.
On se figure que l'on ne saura pas faire ce que l'on n'a jamais appris.
Ce mécanisme suscite un faible niveau de confiance en soi.
Il semble alors important de se faire aider par une thérapie cognitive*.
Ce qui freine notre confiance en nous-même,
ce sont nos peurs non maîtrisées, nos failles,
nos faiblesses, nos appréhensions ou notre fragilité.
Le principal de ces freins s'articule autour du complexe d'infériorité.
Il n'engendre que des sentiments négatifs vouant toute action à l'échec.
La personne pense qu'elle est nulle ou qu'elle n'y arrivera jamais,
ou encore que les autres feront toujours mieux.
Ce sentiment d'infériorité se nourrit de situations dans lesquelles
on s'imagine systématiquement à son désavantage,
"Puisque les autres ne peuvent être que mieux que moi... ", pense-t-on.
Il s'ensuit une survalorisation d'autrui, d'où une autocritique permanente.
Un autre de ces freins qui perturbe la confiance en soi est la honte.
Elle résulte d'un sentiment de dépréciation reposant
sur un degré d'exigence extrême dans les rapports à autrui.
Dans ces conditions, on n'aime pas son corps ni ses idées,
encore moins sa voix ou ses défauts.
Bref, rien ne trouve grâce à ses propres yeux.
Éprouvant la honte d'elle-même, la personne s'est persuadée
de ne jamais pouvoir être telle qu'elle aurait toujours souhaité.
Elle ressent aussi l'impression de constamment faire mal les choses
et de ne pas savoir s'adapter aux changements.
Cette attitude négative engendre
la culpabilité dans la relation aux autres :
"Je ne pourrai jamais faire une rencontre"
ou "Je ne suis vraiment bonne à rien".
Le repli par rapport aux autres va créer,
à la longue, une forme d'exclusion.
On en arrive à se persuader que l'on n'est pas digne
d'être aimé tel que l'on se présente.
En conséquence, on préfère éviter les relations.
Ou encore, lorsqu'il y a relation, on vit mal les échanges
en ne conservant que les aspects négatifs de ce qui a pu être dit.
On ne retient que les mauvaises choses pour recevoir
chaque argument comme des critiques potentielles.
Cela renforce l'hypersensibilité et donc la mauvaise opinion
que l'on avait déjà de soi :
"A quoi bon donner mon avis puisque ce que je vais dire
n'intéressera personne ?".
Finalement, cette forme d'exclusion se traduira aussi
par l'acceptation permanente des idées d'autrui
par peur de déplaire un peu plus.
On s'enferme alors dans un personnage sans âme,
à l'affût de tout ce qui peut être dit de dérangeant.
Après le complexe d'infériorité, la honte et l'exclusion,
on remarque un autre obstacle à la confiance en soi : le pessimisme.
Ce comportement fait de résignation et de découragement
se manifeste au quotidien dans tous les secteurs.
On se juge incapable de quoi que ce soit,
avec une impression de défaitisme immense.
La fuite des responsabilités ou des changements caractérise cet état.
Le frein ultime à la confiance en soi sera celui de l'anxiété*
résultant de tous ces comportements et pensées négatifs.
L'anxiété généralisée provoque une peur
face à une situation donnée en induisant une incapacité à la maîtriser.
Des pensées automatiques du genre "Je n'y arriverai jamais"
ou "Mais qu'est-ce que je peux faire ?" s'imposent.
A la longue, cette anxiété pourra avoir des répercussions somatiques
sous la forme d'angoisses (sueurs, palpitations, vertiges, oppression thoracique…).
La boucle sera bouclée lorsqu'on aura dit que le manque de confiance en soi
augmente la sensation d'anxiété, puis d'angoisse.
De plus, la réaction anxieuse provoque
une forte déstabilisation ainsi qu'une désorganisation.
Le coût en énergie devenant trop important
pour assumer une situation potentiellement génératrice de phobie,
on choisit progressivement la fuite ou l'évitement,
et plus rien de bon ne peut advenir.
Les obstacles extérieurs
Les obstacles extérieurs viennent généralement
des personnes de l'entourage pour lesquelles
un changement personnel représente une menace
sur l'équilibre relationnel présent.
Il va s'ensuivre toute une cohorte de manœuvres
destinées à faire changer d'avis pour préserver une situation
au sein de laquelle les "autres" trouveraient leur compte.
Tout d'abord, celui ou celle qui veut changer
peut faire l'objet de jugements de valeur extrêmement négatifs :
"Tu es devenue complètement folle maintenant" ;
"On n'arrive plus à te comprendre".
On arrive aussi à des tentatives de culpabilisation :
"Qu'est-ce qu'on va devenir ?"
ou "Tu ne te rends pas compte ?".
D'autres obstacles extérieurs se développent aussi
face à une volonté de changement personnel
comme des menaces ou des violences verbales :
"Si jamais tu fais ça",
ou des phénomènes de rejet :
"Tu n'es plus comme nous, tu es trop différent... ".
Enfin, il arrive parfois que la personne en quête d'épanouissement
soit confrontée à la difficulté d'assumer sa volonté de changement
en devenant perméable aux sentiments négatifs de son entourage.
Elle arrive à épouser la vision protectionniste des autres
sans mesurer les causes exactes de leurs désapprobations.
Changer est plus facile à souhaiter qu'à concrétiser.
Mais en identifiant, une étape après l'autre,
les différents obstacles intérieurs et extérieurs,
on retrouve le chemin de la confiance en soi.
Cela repose sur l'acceptation de ce que l'on est
avec ses qualités et ses défauts.
En résumé :
1 – Vouloir changer :
Il est rare qu'au cours d'une existence l'on n'éprouve pas
le désir d'un changement personnel de mode de vie,
de situation, d'apparence même.
Mais bien des obstacles s'opposent à ce désir.
Il importe de les identifier.
2 – Les forces d'opposition :
Une personne qui veut changer doit affronter des obstacles
qui sont à l'intérieur d'elle-même, mais aussi parfois
surmonter ceux que son entourage dresse devant elle
pour la détourner de sa décision.
3 – L'identification des obstacles :
C'est en identifiant les obstacles, étape par étape,
que l'on parvient à se connaître, à s'accepter tel que l'on est,
et à prendre confiance en soi.
© Stéphane Szerman
Psychothérapeute
Les thérapies cognitives :
Elles s'appliquent aux phénomènes
de distorsion de la pensée avec lesquels une personne appréhende les événements.
Lorsqu'elles s'appliquent à la mesure des obstacles,
le thérapeute cherchera à identifier les phénomènes internes
inhibant l'élaboration positive de sa pensée.
En prenant conscience de ses pensées irrationnelles
induisant des comportements inadaptés,
la personne apprendra à substituer à son système
de pensées invalidantes des pensées reposant sur une vision
et sur des jugements réalistes grâce aux principes de l'apprentissage.
Qu'est-ce que l'anxiété ?
On définit généralement l'anxiété comme un « état de désarroi psychique ressenti
en face d'un danger indéterminé et imminent,
s’accompagnant d'un sentiment d'insécurité ».
Il s'agit d'un trouble intellectualisé, à la différence de l'angoisse,
qui se caractérise par des crises paroxystiques et
des équivalents somatiques (respiratoire, cardiaque ou abdominal).
En fait, on peut dire que l'anxiété est au psychisme
ce que l'angoisse est au physique, pour ce qui concerne
les répercussions somatiques liées à l'anxiété.
A lire pour aller plus loin sur le sujet :
A retrouver dans la rubrique :
Thématiques Existentielles (Psychologie et Conseils)